La question de l’art doit se distinguer de celle de la culture : ne pas confondre les problèmes de la communication et de l’échange ; l’art, à mes yeux, engendre le geste d’exception, et est comme écrit Mallarmé « une pratique dont le sens gît au mystère du cœur ».
Par cette exposition je propose une grande ouverture : des artistes connus, moins connus, français ou étranger ayant travaillé ou vivant en France, de générations différentes avec des visions artistiques diversifiées permettant ainsi d’envisager des confrontations dans de nombreux domaines.
La chaise s’est imposée : elle vient de la vie quotidienne et se trouve problématisée par l’art ; avec ce point de départ identique demandé à un grand nombre d’artistes sont présentes la chaise du sculpteur, celle du peintre, du coloriste, du conceptuel, de l’expressionniste, de lettriste, de l’in situ, du pop, du minimaliste…
Eclectisme. Multiplicité. Montrer sans jugement à priori demeure la politique adoptée; laisser le visiteur librement entrer dans la profondeur de l’œuvre rechercher l’œuvre manquante voire l’œuvre à venir.
Cette manifestation relève d'une envie de voir ce qui n’est pas encore porter par la mode mais dans la fibre de l’inattendu, jusqu'à l’étonnement.
Notion de rencontre avec des artistes, avec les œuvres.
Là demeure mon engagement. Qu'il soit source de joie.

 

The problem of ART should be separated from the question of CULTURE: not to confuse questions related to communication and exchange; in my eyes, art generates a sign of exception, and is as Mallarmé wrote: “a practice in which sense lodges in the mystery of the heart”.
With this exhibition, I offer a wide scope: well known or lesser known artists, French artists or other artists who have worked or lived in France, of different generations, with diversity in artistic visions, thus allowing encounters with numerous domains.
The chair imposed itself; it comes from daily life and is questioned by art; from this same starting point, the chair asked many artists; the chair of the sculptor, the painter, the colorist, the conceptualist, the expressionist, the letterer, the in-situ, the pop, the minimalist…
Eclecticism. Multiplicity. To show with no judgment is the adopted policy, leaving the visitor free to enter the work’s depth, and possibly to seek for the missing piece or the work to come. This event originates in the desire to see what is not yet in fashion, but what is still in unexpected weaves, to the point of bewilderement.
The idea of encountering the artists and their work; that is the commitment, I hope it will be heard.

Philippe DELAUNAY, Collectionneur
Catalogue de l’exposition Assises

 

 

Les objets quotidiens qui nous entourent, outils, utiles, ustensiles, devenus banals à force d’être familiers, finissent par perdre leur singularité. On peut même dire qu’on ne les voit plus parce qu’ « on les a assez vus ».
Le poète Francis Ponge avait su rendre la parole aux objets – le cageot, le homard, la cigarette, l’abricot, la pluie…Il fallait, disait-il, les « réparer » pour leur rendre leur puissance d’objection. C’était, ajoutait-il, la fonction modeste mais vitale de l’artiste que de savoir ainsi réparer le monde par fragments.
Voici désormais « la chaise » ainsi réparée par cent artistes divers, qui ont accepté de jouer le jeu de l’objet : « l’objeu », disait Ponge encore. Voici la chaise détruite, déconstruite, reconstruite, mise en lambeaux, réduite en poussière, déchiquetée, désassemblée, défigurée, dématérialisée, décorée, ornementée…,mais plus que jamais « chaise » enfin, puisqu’elle nous rend à notre assise.
Oui, notre assise, puisque l’art à l’œuvre ne s’expatrie du réel que pour mieux nous restituer, poétiquement, au jeu du monde et à la vie des choses.

 

Daily objects which surround us, tools, utilities, utensils, have become banal from being too familiar and finally lose their singularity. We can even say we no longer see them, because “we have seen too much of them”
Francis Ponge, the poet, knew how to bestow speech to objects- the crate, the lobster, the cigarette, the apricot, rain… he said they must be “repaired” to give them back their power of object. This was, he added, the artist’s modest but vital function, to know how to repair the world piece by piece.
Hence, here is “the chair” thus repaired by one hundred different artists, who were game enough to play the object game: “the objgame”, as Ponge also called it. Here is the chair destroyed, deconstructed, put to shreds, reduced to dust, slashed, dismantled, disfugured, dematerialized, decorated, ormementated…, but finally more than ever “chair”, since it returns us on to our seats.
Yes, our seats, because art at work only abandons reality to better reinstate us, poetically, to the game of the world and to life of things.


Jean LAUXEROIS, Philosophe
Catalogue de l’exposition Assises


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